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CD93 : « La part de gain liée au pilotage de la qualité, des délais et des prix est très importante »

Par Guillaume Trecan | Le | Direction ha

Cet article est référencé dans notre dossier : Dossier spécial Achats Publics : Particularités et vertus des achats publics

Franck Barrailler, directeur de la commande et de l’achat public du Conseil départemental de Seine Saint-Denis explique pourquoi il est crucial de replacer au cœur des priorités des acheteurs publics le suivi de la performance des fournisseurs. Il sera Grand Témoin de l’atelier-débat « SRM, piloter la relation fournisseur au-delà de la notification du marché » lors des HA Days Achats Publics, les 3 et 4 décembre à Deauville.

Franck Barrailler, directeur commande et achat public, Conseil départemental de Seine St Denis. - © D.R.
Franck Barrailler, directeur commande et achat public, Conseil départemental de Seine St Denis. - © D.R.

Le suivi de la performance des fournisseurs dans l’exécution des marchés publics vous semble-t-il satisfaisant ?

Cela fait trente ou quarante ans, que la majorité des élus et des directeurs généraux des services ne demandent pas à leurs directions commandes publiques ou leurs services marchés de s’intéresser à ce qui se passe après la notification des marchés, mis à part la gestion des avenants ou le traitement parfois des actes spéciaux de sous-traitance ou de la révision des prix. Cette partie exécution du marché repose en général sur les prescripteurs qui considèrent d’ailleurs pour beaucoup qu’il s’agit d’une activité de leur ressort. Des ressources et des moyens ont été mis au niveau de la rédaction du dossier de consultation des entreprises et de la procédure de passation qui ne durent que quelques mois, alors que l’exécution du marché s’étale sur plusieurs années et recèle une multitude de problématiques. C’est pour le moins paradoxal.

Les prescripteurs ne sont pas les mieux formés aux techniques de pilotage contractuel, de la relation fournisseur et de la négociation

En quoi le fait que la responsabilité de l’exécution des marchés repose sur les prescripteurs pose-t-il un problème ?

Les prescripteurs ne sont pas les mieux formés aux techniques de pilotage contractuel, de la relation fournisseur et de la négociation avec les titulaires de marchés. Lorsqu’il s’agit d’appliquer des pénalités de retard, il est par exemple crucial de connaître les mécanismes qui permettent de le faire dans le cahier des charges et le contrat. Les prescripteurs peuvent être légitimes pour piloter le prestataire mais ils vont avoir besoin d’un accompagnement sur l’application du contrat et la gestion de la relation fournisseur. Avant le retour de l’inflation, très peu d’entreprises demandaient des révisions du prix dérogatoires aux contrats, ce qui est maintenant très fréquent. Négocier ces révisions demande une certaine expertise. De fait, nous constatons un glissement de l’insécurité juridique de la partie passation des marchés vers la partie exécution, ce qui met le prescripteur dans une situation très inconfortable.

Quelle est la part de la performance achats qui se joue lors l’exécution des marchés ?

Les négociations financières avec les fournisseurs au moment de l’exécution des contrats rapportent en moyenne 5 % de gains achats. Mais la part de gain liée au pilotage de la qualité, des délais et des prix est en revanche très importante. Surtout quand on est dans une logique d’évaluation des contrats et des fournisseurs pouvant déboucher sur des plans de progrès, comme c’est le cas au Conseil départemental de Seine Saint-Denis. Il est également important de vérifier, au moment de l’exécution, la réalité des engagements des fournisseurs en matière d’achats responsables.

Dans quelle mesure un acheteur public peut-il tenir compte de l’historique de la performance passé des fournisseurs, lorsqu’il lance un nouveau marché ?

Dans une jurisprudence de 1986, le Conseil d’Etat donne la possibilité aux acheteurs publics d’écarter un candidat postulant à un nouveau marché qui aurait mal exécuté le contrat lors d’un précédent marché. Mais, si l’on veut écarter une entreprise, il faut le faire sur la base d’éléments tangibles et d’un dossier solide. Ce qui nous ramène à la nécessité pour le prescripteur d’être accompagné. Très peu de prescripteurs savent en effet rédiger une lettre de mise en demeure par exemple.

Nous avons mis en place, au conseil départemental de Seine Saint-Denis, un bureau de l’exécution, de l’évaluation et du contrôle interne

Que préconisez-vous ?

En 2023 nous avons mis en place au conseil départemental de Seine Saint-Denis, un bureau de l’exécution, de l’évaluation et du contrôle interne avec des personnes travaillant à temps plein sur l’exécution des marchés. Cela nous avait notamment été préconisé à l’issue d’un contrôle effectué par la Chambre régionale des comptes et l’Agence française anticorruption, en 2022 qui soulignaient que les choses n’étaient pas assez formalisées au niveau de l’exécution. Dans mon précédent poste à la Ville de Clamart, à défaut d’équipe dédiée, nous avions des collaborateurs qui intervenaient auprès des prescripteurs en cas de dysfonctionnement. Même avec peu de moyens humains, on peut faire en sorte de définir différemment les priorités des équipes pour leur permettre de s’intéresser à la question.

Quels profils doit-on privilégier pour ces tâches ?

Notre service dédié comprend aussi bien des juristes et des acheteurs qui déploient des compétences de négociation, d’analyse et d’audit contractuels et de gestion de projet pour piloter des plans d’amélioration.

Que permet ou ne permet pas le contexte du code de la commande public en matière de gestion des relations fournisseurs ?

Dans le public nous rencontrons plus de contraintes lorsque nous voulons modifier le contrat par des avenants parce que c’est réglementé. Mais nos outils se rapprochent énormément du privé, en particulier en ce qui concerne les plans de progrès qui peuvent découler des évaluations que nous mettons en place.

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