FM Logistic : « Le métier de nos acheteurs a changé »
Directeur des achats Groupe de FM Logistic, Olivier Mansard a piloté les projets de renouvellement de la charte Achats Responsables de l’entreprise ainsi que la labellisation RFAR (Relation Fournisseurs et Achats Responsables). Une transformation progressive qui a mené à la modification des pratiques et des habitudes de son équipe d’acheteurs.

Propos recueillis par Stéphanie Gallo Triouleyre
Repères
Chiffre d’affaires : 1,7 Md d’€
Effectif : 28 000 personnes
Effectif achats : 32 personnes, dont 5 catégories managers
Vous avez signé récemment la Charte Relations Fournisseurs et Achats Responsables (RFAR). Pourquoi vous être engagé sur ce chemin ?
FM Logistic a pour ambition et exigence d’être le prestataire logistique omnicanal le plus durable. C’est inscrit dans notre feuille de route Powering 2030, avec un objectif de neutralité carbone pour nos activités d’entreposage et de réduction de 30 % de notre empreinte carbone pour nos activités de transport d’ici là. Notre adhésion à la charte RFAR s’inscrit exactement dans cette stratégie globale d’entreprise.
Nous espérons une labellisation RFAR d’ici moins d’un an
Cette charte comporte dix engagements : une relation respectueuse et responsable avec ses fournisseurs, l’éthique, l’identification de situations de dépendance, la prise en compte des problématiques RSE etc. Nous avons constaté que cette charte est, en réalité, très proche de notre propre charte d’entreprise, établie en 2017. De ce fait, nous sommes déjà assez avancés sur un certain nombre de points. Nous espérons donc une labellisation RFAR d’ici moins d’un an. Cela viendra consacrer un état d’esprit déjà en place.
Vous le disiez, vous avez donc, en parallèle de la charte nationale RFAR, votre propre charte d’entreprise des achats responsables. Quels sont ses enjeux et ses résultats ?
Notre première charte avait été mise en place en 2017, avant mon arrivée, puis nous avons, avec le responsable achats responsables, travaillé en 2024 à sa mise à jour. Cette nouvelle version est opérationnelle depuis juin dernier. Elle s’appuie sur quatre piliers principaux : privilégier des achats durables et locaux - avec comme objectif de réaliser 40 % de nos achats dans un périmètre de 100 kilomètres de l’exécution -, développer des vrais partenariats avec nos fournisseurs (équité, transparence, évaluations annuelles, innovations, etc.), choisir des partenaires engagés (audits RSE pour s’assurer des qualifications RSE notamment, attention à l’inclusion, etc.) et acheter avec intégrité et éthique. Nous nous engageons par exemple à être transparent sur le résultat des appels d’offres, à respecter les délais de paiement.
Toutes ces démarches permettent d’améliorer notre notation Ecovadis. Nous sommes aujourd’hui Gold. Pourquoi pas arriver au niveau Platinium ?
Avant nos acheteurs avaient des objectifs économiques et de qualité de service. Aujourd’hui, ils ont tous des objectifs d’innovation et de développement durable
Qu’est-ce que ces chartes viennent changer dans le job de vos acheteurs ?
Au-delà des chartes en elles-mêmes, les acheteurs doivent avoir aujourd’hui de nouvelles ambitions. Globalement, avant nos acheteurs avaient des objectifs économiques et de qualité de service. Aujourd’hui, ils ont tous des objectifs d’innovation et de développement durable. Cette transformation représente un vrai challenge en terme managérial mais elle est accompagnée par de nombreuses formations.
Sur quels points devez-vous encore avancer ?
L’enjeu désormais est d’avoir les moyens de s’assurer et montrer que ce que nous annonçons est vraiment effectif. Cela signifie la mise en place de KPI, vérifier que chaque acteur des achats soit garant de ces deux chartes et les respecte. Par exemple, nous allons intégrer dans nos systèmes d’information des critères d’émission de CO2 par nature de produit. A chaque article sera aussi associé des poids et des coefficients de CO2, cela permettra à terme d’avoir un suivi précis de nos émissions.
Nos défis sont aussi de réduire encore les risques opérationnels et de poursuivre le travail d’intégration d’outils digitaux dans nos processus achats
Hormis ces questions RSE, quels sont aujourd’hui vos principaux enjeux et défis à venir ?
Ces trois dernières années, nous avons déjà bien avancé sur l’optimisation des achats, ce qui est un élément important de la compétitivité de l’entreprise. Nos défis sont aussi de réduire encore les risques opérationnels et de poursuivre le travail d’intégration d’outils digitaux dans nos processus achats. Ce sont des enjeux clés pour améliorer la transparence, la traçabilité et la performance globale de nos opérations.
Quel est le périmètre de votre poste pour FM Logistic ?
Je travaille sur la partie exploitation logistique. Je gère plusieurs centaines de millions d’euros d’achats, au service des pays sur lesquels nous sommes présents : la France - qui pèse la moitié du montant total des achats -, la Pologne, la Tchéquie, la Slovaquie, la Roumanie, l’Espagne, l’Italie, l’Inde, le Brésil et le Vietnam. Nos principaux achats sont des achats indirects, focalisés principalement sur le travail temporaire, les chariots, le nettoyage, sécurité, espaces verts, l’IT et l’énergie. Nous avons aussi un peu d’achats directs : il s’agit surtout de consommables comme les cartons, etc.
Vous êtes en poste depuis 2022, avez-vous modifié l’organisation en place ? Quels changements avez-vous apporté ?
J’ai mis en place une organisation matricielle, issue de mes expériences précédentes, avec des responsables achats pays qui me reportent fonctionnellement et qui reportent par ailleurs au directeur financier local. J’ai par ailleurs mis en place une organisation spécialisée avec cinq global category managers qui me reportent aussi directement.
Ensemble, nous définissons les stratégies achat et les best practices pour chacune des grandes catégories d’achat évoquées précédemment. Nous mettons en place des marchés globaux lorsque c’est possible : l’IT notamment, les chariots. Ce n’est pas possible pour certains achats comme la téléphonie mobile pour laquelle les offres sont décentralisées. Enfin, nous essayons de créer des synergies par groupes de pays. Pour chacune des grandes catégories d’achats, nous avons déployé des plans stratégiques autour de leviers classiques : standardisation, réduction du nombre de fournisseurs, mise en place de process etc. Par exemple, sur les process, il est désormais obligatoire de passer un appel d’offres à partir d’un certain montant.
J’ai également institutionnalisé une culture de la performance. Désormais, nos 32 acheteurs ont des objectifs bien définis. Nous avons mis en place des outils de tracking afin de bien identifier les priorités et les résultats. Ces objectifs sont économiques mais pas seulement. Par exemple, chaque acheteur doit développer avec ses fournisseurs au moins un projet innovant par an en lien avec le développement durable.
Comment créer de la cohésion et de la coordination dans une organisation aussi décentralisée ?
Nous faisons par exemple des réunions tous les trimestres à l’occasion desquelles nous présentons les résultats et les dossiers importants du moment. Et puis, à chaque fois, un acheteur ou un pays vient présenter une bonne pratique afin d’inspirer le reste de l’équipe. Par exemple, nous avions développé d’abord en France l’utilisation de palettes de seconde main. Désormais, cette pratique est dupliquée dans tous les pays. Idem pour l’achat de smartphones reconditionnés. Autre exemple : en Pologne, l’équipe était assez pointue sur les films plastiques. Ils ont trouvé une technologie très intéressante : un film moins épais au centre qu’à l’extérieur permettant d’alléger la matière mais en assurant quand même le maintien nécessaire.
Portrait
Olivier Mansard a rejoint FM Logistic il y a trois ans en tant que directeur achats groupe, après un court passage d’une année chez Hillebrand. Il a débuté sa carrière comme acheteur indirect pour l’entreprise française Facom, rachetée ensuite par la société américaine Stanley, dans laquelle il a évolué pendant 22 ans. Il a ensuite gravi les échelons de la hiérarchie achats dans cette société au gré de sa croissance, créant par exemple le service achats indirects Europe, avant d’élargir son périmètre de responsabilité à l’Amérique latine et l’Asie.