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Après avoir participé à la transformation de la fonction, Nicolas Passaquin promu CPO de Telia

Par Mehdi Arhab | Le | Direction ha

Devenu en juin 2024 directeur des achats et de la supply chain par intérim de Telia Company, principal opérateur de télécommunications de Suède et de Finlande, Nicolas Passaquin a été officiellement promu à ces deux postes en décembre 2024. Une reconnaissance pour ce Français qui a été l’un des principaux acteurs de la transformation de la fonction achats du groupe entamée en 2021.

Après avoir participé à la transformation de la fonction, Nicolas Passaquin promu CPO de Telia
Après avoir participé à la transformation de la fonction, Nicolas Passaquin promu CPO de Telia

Entreprise peu, voire extrêmement peu connue en France, Telia Company est pourtant un géant de son secteur dans les pays d’Europe du Nord, plus particulièrement en Suède et en Finlande. Telia Company est en effet le principal opérateur de télécommunications de ces deux contrées, proposant de nombreux services d’accès au réseau et de télécommunications. Fondée au début des années 2000, l’entreprise, détenue principalement par l’État suédois, est le fruit du rapprochement entre les anciens opérateurs suédois, Telia, et finlandais, Sonera. L’acteur se concentre aussi bien sur les activités de téléphonie mobile et de téléphonie fixe que de télévision, à travers sa branche dédiée qui détient notamment MTV Finland ou encore TV4, l’une des principales chaînes de télévision suédoise. L’opération, pour laquelle Telia avait mis en 2018 plus de 9 milliards de couronnes suédoises sur la table, soit plus de 800 millions d’euros, lui avait permis d’étoffer considérablement ses offres de contenus, qu’il avait commencé à proposer depuis sa décision, en 2014, d’investir davantage dans cette direction.

Au demeurant, en 2023, Telia Company a enregistré un chiffre d’affaires de plus de 88 milliards de couronnes suédoises, soit près de 8 milliards d’euros. L’entreprise emploie entre 15 000 et 20 000 personnes et a également assis sa présence, en plus de la Suède et de la Finlande, en Norvège, au Danemark, en Lituanie et en Estonie.

Venu rejoindre les rangs de l’opérateur au cours de l’été 2021 afin d’épauler le plan de transformation porté par la directrice des achats groupe alors en place, Nicolas Passaquin est devenu depuis peu le nouveau directeur achats et supply chain du groupe. Une véritable reconnaissance pour ce Français, spécialiste des Achats, qui a effectué la majeure partie de sa carrière à l’étranger ; en Suisse, au Royaume-Uni ou encore à Singapour notamment. En tant que numéro 2 de la direction des achats et de la supply chain de Telia Company il a piloté la refonte des processus achats et dirigé le centre d’expertise du groupe.

Lorsque l’opportunité Telia s’est présentée, je n’ai pas hésité bien longtemps. J’avais à cœur de soutenir ce plan de transformation achats et supply chain de ce grand groupe

En plus de ce rôle, il gérait également les équipes projets aux Achats et conduisait l’intégration des nouvelles sociétés après les opérations de fusion et acquisition menées par le groupe. « J’ai principalement travaillé à l’étranger et géré des équipes multiculturelles, sur d’importants projets de transformation et d’évolution de grosses structures achats. Lorsque l’opportunité Telia s’est présentée, je n’ai pas hésité bien longtemps. J’avais à cœur de soutenir ce plan de transformation achats et supply chain de ce grand groupe », explique le nouveau CPO et CSCO de Telia Company.

Une couverture totale des achats les plus stratégiques et critiques

Rattaché au CFO du groupe, Eric Hageman, Nicolas Passaquin est à la tête d’une direction qui comprend en tout et pour tout quelque 250 personnes, parmi lesquelles environ 60 opèrent au sein de la filière supply chain. La direction des achats est structurée de manière classique autour de lignes hiérarchiques et d’une équipe totalement intégrée avec du category management. «  La direction achats est construite de façon simple : par catégorie d’achats, avec une équipe dite “global“, dans le sens où elle rapporte dans son entièreté au patron des achats. Nous n’avons pas à proprement parler de direction achats par pays, quand bien même nous comptons des acheteurs dans chaque état où le groupe est présent  », expose Nicolas Passaquin. En plus des achats et de la supply chain, la gestion des risques tiers-fournisseurs et le développement durable entrent dans son périmètre d’intervention.

En matière de décarbonation, Telia a communiqué depuis plusieurs années sa trajectoire de décarbonation et affiche de grosses ambitions. Le groupe espère être net-zero d’ici 2035. Les Achats sont évidemment en première ligne pour aider l’entreprise à atteindre ses objectifs, puisque le scope 3 représente le gros de ses émissions carbones. Nous avons, avec nos fournisseurs stratégiques, travaillé et lancé un programme structuré pour les réduire. Il implique notamment un plan d’accompagnement et répertorie des mesures concrètes à mettre en place. Par ailleurs, sur le plan énergétique, au regard de notre importante consommation en électricité, nous avons décidé de nous fournir qu’en énergie renouvelable via des centrales photovoltaïques pour alimenter nos infrastructures.

Si elles ne sont pas les plus importantes en volume, les catégories d’achats réseaux et infrastructures sont de loin les plus stratégiques et critiques pour Telia Company, car particulièrement liées à son cœur de métier et, plus globalement, au déploiement de la 5G ainsi qu’aux importantes évolutions technologiques qui ont bouleversé le secteur des télécommunications ces dernières années. Le réseau est entièrement construit et déployé en fonction d’exigences spécifiques en matière de connexion, de disponibilité et de capacité. Depuis un certain temps, Telia Company, en tant que premier opérateur suédois et finlandais, se veut à la pointe de cette évolution et veille à ce que ses nombreux clients des pays nordiques bénéficient de ce type de solutions sur mesure. À ces deux catégories d’achats s’ajoutent des achats indirects plus conventionnels liés aux services généraux, à l’IT, aux voyages d’affaires ou encore à diverses prestations intellectuelles et prestations de services.

De nouveaux outils et un positionnement retravaillé pour gagner en efficacité

Lorsque j’ai rejoint Telia Company, je me suis vite aperçu du niveau de maturité assez élevé de la direction des achats et de la supply chain. Cela dit, des choses ici et là pouvaient être améliorées

Après avoir été l’un des principaux pilotes du changement aux Achats pendant trois ans, Nicolas Passaquin entend bien évidemment s’appuyer sur ce qui a été porté par sa prédécesseure. Il n’est évidemment pas question de changer de cap donc, l’objectif du nouveau patron des achats étant bien de s’inscrire dans la continuité et de capitaliser sur ce que l’ancienne CPO et lui ont participé à mettre en œuvre. « Lorsque j’ai rejoint Telia Company, je me suis vite aperçu du niveau de maturité assez élevé de la direction des achats et de la supply chain. Cela étant dit, des améliorations étaient encore possibles ». ».

Ainsi, l’objectif du plan de transformation consistait notamment à améliorer et simplifier les processus ainsi qu’à automatiser certaines tâches chronophages liées à environ 20 % des dépenses du groupe. Il s’articulait autour de la mise en place de nouveaux outils visant à renforcer la gouvernance, l’exécuter et permettre de gérer proactivement les dépenses. « Le groupe compte 5 ERP et il était parfois un peu difficile d’avoir de la visibilité sur l’ensemble de notre panel et de nos dépenses. Ce projet de digitalisation nous a grandement aidé à centraliser et simplifier le process. Nous avons déployé Coupa sur la partie S2P et opté plus globalement pour une approche best-of-breed afin d’adresser au mieux nos besoins. Nous avons par exemple mis en place Fairmarkit, un outil de RFQ boosté à l’IA, et bien d’autres solutions pour permettre à nos acheteurs de se concentrer sur ce qui fait le plus gros de leur métier à savoir les dépenses majeures, la gestion des risques ou encore la sustainability. À terme, de nouveaux investissements au niveau des outils seront réalisés pour améliorer l’efficacité des équipes et minimiser coût de certains processus », fait savoir Nicolas Passaquin.

Ce projet de digitalisation du process achats devait in fine permettre à la fonction d’apporter davantage de valeur au business et a été une piste d’homogénéisation du groupe. En ce sens, le plan de transformation avait aussi pour objectif de faire évoluer les missions des équipes achats dont le rôle se limitait parfois au simple champ transactionnel.

Il était important pour nous que la fonction ne se contente pas simplement de gérer les appels d’offres, de faire de la négociation, de tailler dans les coûts …

L’ancienne directrice des achats du groupe et lui ont ainsi revu en profondeur le positionnement des Achats dans l’entreprise, dans l’optique de générer plus de valeur et d’aider au mieux les directions métiers dans leur quotidien et grands projets. Un nouveau modèle organisationnel a alors été défini afin que les acheteurs soient engagés plus tôt dans l’acte d’achat. « La question du rôle à adopter par les Achats s’est vite imposée à l’ancienne CPO. À ses yeux, et je partageais son avis, il était nécessaire que les Achats développent un fort prisme business partner et réfléchissent en termes de valeur ajoutée apportée à l’entreprise. Il était important pour nous que la fonction ne se contente pas simplement de gérer les appels d’offres, de faire de la négociation, de tailler dans les coûts … Elle avait bien plus à apporter », défend Nicolas Passaquin. En sortant de ce rôle administratif, les Achats sont parvenus en l’espace de quelques mois à renforcer la gestion de la relation fournisseurs mais aussi et surtout celle entretenue avec les clients internes. « Ma priorité aujourd’hui est de poursuivre la transformation digitale des Achats tout en renforçant notre rôle de partenaire stratégique. L’objectif est d’apporter toujours plus de valeur, au-delà des gains traditionnels, notamment sur les enjeux de durabilité et d’innovation », nous explique-t-il.

Des enjeux RH pris par le bon bout

Dans une entreprise au fonctionnement extrêmement décentralisé, le plan de transformation des achats a été mené à bien et sans accroc majeur. Et les résultats sont plus que concluants. Nicolas Passaquin peut donc voir venir et peaufiner avec quiétude ce qui lui tient à cœur. « Les Achats et la Finance figurent parmi les rares structures communes du groupe. Il était primordial de parvenir à consolider rapidement les demandes et besoins au niveau de chaque pays, branches … Les prescripteurs, les managers des différents pays et fonctions avaient peut-être l’impression que nous n’étions qu’une simple fonction support. Le travail mené au cours du plan de transformation a changé la vision qu’ils avaient des achats. Nous leur avons démontré que sans nous, ils étaient moins forts face aux marchés fournisseurs. Ils ont une meilleure compréhension de notre métier et nos relations n’en sont que plus solides désormais », se félicite le CPO de Telia.

Ce plan de transformation achats a donc été bénéfique pour tous en interne, mais en premier lieu pour les acheteurs qui ont pu accroître leur expertise. Pour Nicolas Passaquin, des efforts peuvent et doivent tout de même encore être faits pour faire grandir un peu plus la fonction. « La rotation des équipes achats, d’une catégorie à une autre, est par exemple un élément sur lequel nous avons beaucoup travaillé et sur lequel nous continuerons de le faire ».

Dans l’ensemble, l’axe RH est pris avec un sérieux de tous les instants. « Tout est fait pour renforcer l’autonomie, la prise de décision et le leadership des acheteurs. Des modules de formation internes et externes continueront d’être proposés afin de les aider à monter en compétences, à affiner leur vision stratégique. C’est essentiel pour proposer des parcours de mobilité internes à nos équipes, aussi bien au sein même de la direction que dans d’autres fonctions chez Telia », indique le directeur des achats groupe. Ce dernier a notamment participé, au cours du plan de transformation, à la création de « cercles » qui visent à réunir achats et supply chain sur des sujets donnés : IA, développement durable et bien d’autres. « Nos équipes se réunissent tous les quinze jours afin d’échanger, se former et partager leur expérience sur des sujets précis. L’idée est que les plus compétents et experts sur le sujet partagent leurs bonnes pratiques et donnent des clés de compréhension à ceux veulent apprendre », conclut Nicolas Passaquin.

Un amour inconditionnel pour les Achats

En un peu plus de 25 ans de carrière, Nicolas Passaquin s’est forgé une réputation d’expert en matière de transformation des achats. Auteur de deux ouvrages sur l’innovation et la fonction achats, Nicolas Passaquin partage régulièrement sa vision à travers des articles publiés sur LinkedIn. Il continue d’enrichir son expertise au contact de ses pairs et est toujours prêt à échanger. Pour conclure notre entretien, il souligne : « Je reste passionné par les évolutions de notre métier et je m’efforce de nourrir ma réflexion en échangeant régulièrement avec d’autres directeurs achats sur les nouveaux défis de notre profession ».