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LPCR : « J’assume le pilotage des équilibres dans nos décisions entre le coût et la RSE »


Emmanuel Faudais, directeur des achats du groupe de Crèches Les Petits Chaperons Rouges met en œuvre une politique achats responsables ambitieuse fondée déclinée par famille d’achats, fondée sur une cartographie détaillée des risques RSE. Il sera Grand Témoin de l’atelier-débat « #Feuille de route : faire de la cartographie des risques RSE un plan d’action et d’opportunité » lors des HA Days Achats responsables le 5 mars à Deauville.

Emmanuel Faudais, directeur des achats. - © D.R.
Emmanuel Faudais, directeur des achats. - © D.R.

Pouvez-vous nous présenter la fonction achats de la société Les Petits Chaperons Rouges ?

Les Petits Chaperons Rouges (LPCR) est l’entité du groupe Grandir en France qui compte 1 200 crèches et maternelles dans le monde, notamment aux États-Unis, au Canada, en Angleterre et en Allemagne. En France, nous sommes le pionnier sur le secteur des crèches privées, avec 9 000 collaborateurs qui accueillent 25 000 enfants dans près de 850 crèches. Les Petits Chaperons Rouges réalisent près de 400 millions d’euros de chiffre d’affaires avec 200 millions d’euros d’achats.

En ce qui me concerne, je travaille avec quatre acheteuses et je suis rattaché au directeur général des Petits Chaperons Rouges depuis quelques mois. Cela montre que la fonction contribue directement à la stratégie d’entreprise et aux grands objectifs de l’entreprise.

Quelles sont vos principales catégories d’achats ?

Nous estimons l’importance d’une catégorie d’achats en fonction de deux critères : le niveau de la dépense et la criticité des achats. Certaines catégories telles que les produits d’entretien, les couches ou encore le matériel d’infirmerie ne font, par exemple, pas partie de nos dépenses les plus importantes mais nous les considérons comme des segments d’achats à fort impact opérationnel. La clé d’entrée n’est pas la dépense mais plutôt les critères RSE et sécurité.

Les Achats sont en permanence dans une recherche d’équilibre entre l’économique et l’extra-financier

Comment contribuez-vous à la performance globale des Petits Chaperons Rouges ?

Les Achats sont en permanence dans une recherche d’équilibre entre l’économique et l’extra-financier. Pour atteindre nos ambitions 2024-2027, nous cherchons à la fois à apporter de la performance économique et des économies de tonnes de CO2. J’ajoute que la performance économique ne passe pas nécessairement par des réductions de coûts, d’autant plus dans le contexte d’inflation que nous connaissons sur certains segments, mais plus largement par la maîtrise des dépenses. Nous déployons nos stratégies achats par segment, en adaptant notre stratégie aux contextes internes ou externes propres à ces segments. Le socle de notre stratégie achats est de garantir la sécurité des achats que nous réalisons.

Quelle a été l’impulsion de votre programme achats responsables ?

A l’origine de la construction de notre plan pluriannuel achats responsables, nous sommes partis de la raison d’être des Petits Chaperons Rouges, « contribuer pas à pas à l’éveil des générations », sur laquelle l’ADN Achats est aligné. Nous nous sommes également inspirés des valeurs du groupe - être confiant, engagé, inspirant - qui impactent à la fois la construction et le déroulement de nos plans achat. Notre plan achats responsables part plus spécifiquement de trois axes relevant de la stratégie d’entreprise : offrir un accueil de qualité aux enfants et aux parents, développer des innovations et intégrer les pratiques RSE au cœur des activités. Nous sommes également partis des quatre axes de la politique achat : l’exigence, l’expertise, l’innovation et la responsabilité. Nous nous sommes aussi inspirés du projet pédagogique. Nous avons ainsi fait en sorte que le projet achats s’inscrive en droite ligne du cœur de métier.

D’ici 2025, 100 % des appels d’offres comporteront au moins une clause RSE spécifique

Quels sont les objectifs chiffrés de ce plan achats responsables ?

Le plan achat responsables 2024 2027 fixe l’objectif de réduire de 2 700 tonnes l’impact carbone de notre chaîne d’approvisionnement d’ici 2030, soit -25 %. D’ici 2025, 100 % des appels d’offres comporteront au moins une clause RSE spécifique - propres à chaque catégorie d’achats - dans le cahier des charges. Il doit y avoir au moins deux critères RSE pondérés dans la grille d’aide à la sélection. Enfin, 100 % de nos contrats doivent inclure des clauses RSE. Nous voulons aussi que 100 % de nos principaux segments d’achats soient dans une dynamique de réduction des risques RSE.

Comment avez-vous priorisé les actions de votre plan achats responsables ?

Nous avons travaillé avec l’Afnor à partir de leur outil de cartographie des risques et sur une liste la plus exhaustive possible de critères qui permettent d’évaluer le risque RSE sur 23 segments très spécifiques à la petite enfance. Nous avons par exemple conçu une grille d’évaluation rien que pour le segment des couches. La totalité de nos principaux segments sont ainsi passés au crible afin que les préconisations de l’Afnor soient prises en compte dans nos cahiers des charges et nos contrats. Au-delà de la question du risque, nous voyons une opportunité de progresser sur l’ensemble de nos pratiques segment par segment.

Les Petits Chaperons Rouges achètent 160 000 bouteilles plastiques par an et nous voulons réduire cette consommation de 80 %

Sur quelles actions débouche ce plan ?

Nous avons introduit 10 % d’achats d’électroménagers reconditionnés dans nos approvisionnements. Notre ambition est de monter à 30 % d’ici à 2027. Avec 850 crèches, nous pouvons aligner une demande forte. Nous avons également mis en place des centrales de dilution pour nos produits d’entretien, qui nous permettent de réduire de 98 % nos déchets. Nous réduisons aussi au maximum l’usage des bouteilles d’eau en plastiques dans nos crèches. Les Petits Chaperons Rouges achètent 160 000 bouteilles plastiques par an et nous voulons réduire cette consommation de 80 % à l’horizon 2027 en jouant sur les consommations et là où la qualité de l’eau est réglementairement optimale. Cela représente six tonnes de plastique par an et 23 tonnes de CO2.

Nous organisons aussi des comités RSE avec nos principaux fournisseurs pour capter des innovations. C’est ainsi, par exemple que, en s’inspirant d’une de nos remarques, notre fournisseur de produits d’hygiène commercialise désormais son gel lavant dans des éco recharges, ce qui génère 72 % de plastique en moins et des emballages recyclables à 100 %, fabriquées à quelques kilomètres de leurs bureaux.

Dans la dimension plutôt sociale de la RSE, nous avons également formalisé dans notre stratégie segment prestations d’entretien des espaces verts l’incorporation de sociétés employant des personnes en situation de handicap.

Avez-vous un budget spécifique pour mettre en œuvre ces actions, dont certaines nécessitent des investissements ?

J’assume le pilotage des équilibres dans nos décisions entre le coût et la RSE. Quand des acheteurs proposent des scénarii, nous tranchons en pesant à la fois les conséquences en euros, en CO2 et en impact social. A l’issue de cet arbitrage, nous sommes à l’équilibre en coût complet. En ce qui concerne le reconditionné par exemple, nous n’avons pas suffisamment de recul pour affirmer que ce sera moins cher que du neuf. Nous considérons simplement que l’équilibre économique est conservé. Pour ce qui est de nos centrales de dilution, le coût en termes de capex est neutre et nous avons une économie au niveau des opex et du CO2.

Comment vos fournisseurs perçoivent-ils votre mobilisation sur ce sujet ?

En 2023, nous avons organisé notre première convention annuelle avec nos 50 principaux fournisseurs. Nous avons partagé avec eux notamment deux sujets : l’innovation et la RSE. Il s’agissait de faire un état des lieux de nos avancées et de leur restituer une étude à 360° sur leur maturité en termes de RSE et leur perception de la maturité des Petits Chaperons Rouges en la matière. Cette enquête a révélé un niveau de maturité extrêmement hétérogène entre les fournisseurs. Nos fournisseurs TPE et PME, en particulier, manquent de ressources. Nous travaillons avec un panel de 9 000 fournisseurs dont près de 80 % sont des TPE PME. Elle a aussi mis en lumière leur appétence sur le sujet et leur envie de nous accompagner sur ce sujet.

Comment Les Petits Chaperons Rouges valorisent-ils ces actions RSE ?

C’est un moyen de piloter dynamiquement la performance des fournisseurs. Notre volonté est de travailler avec des sociétés capables de progresser avec nous sur des sujets au RSE. Nous ne sommes plus sur une simple logique du meilleur produit au meilleur prix.