Baromètre Républik HA 1/5 : Fracture acheteurs VS directeurs achats sur la perception des missions
Par Guillaume Trecan | Le | Direction ha
Dans ce premier chapitre d’analyse des résultats du Baromètre de satisfaction de la fonction achats, conçu avec les experts achats du cabinet KPMG, nous étudions la perception de leurs missions par les professionnels des achats. Un décalage important se fait jour, avec des acheteurs bien moins enthousiastes que leurs managers.
Lorsqu’on interroge les professionnels des Achats sur les indicateurs de performance qui intéressent leur direction générale, les savings sont évidemment l’indicateur le plus cité (81 %) du panel, suivi de relativement près par les achats responsables (68 %), qui dominent d’une bonne longueur la satisfaction des clients internes (55 %).
Quels indicateurs de performance intéressent votre direction générale ?
Des acheteurs bien plus terre à terre
A noté toutefois, sur ce sujet un premier décalage entre acheteurs et directeurs achats. Si les directeurs achats restent alignés sur ce podium, les acheteurs traduisent en revanche une vision un peu différente, collant peut-être un peu plus à la réalité du terrain. De leur point de vue, la satisfaction des clients internes arrive deuxième dans l’ordre d’importance (65 %), juste devant les achats responsables (64 %). Cette approche est cohérente avec la perception par les acheteurs des compétences clés, comme nous le verrons dans un prochain chapitre dédié à l’angle RH. « Là où les directeurs achats privilégient le leadership, les acheteurs mettent plus l’accent sur l’écoute et les capacités de communication », relève Tristan Berthod, directeur Opérations, Performance, Stratégie chez KPMG.
Les acheteurs sont 85 % à estimer avoir une action décisive en matière de performance financière. Pour le reste, ils n’ont guère de prétention. Le deuxième domaine dans lequel ils s’estiment capables d’avoir du poids est celui des risques et encore, seulement 48 % du panel ; viennent ensuite la RSE (41 %) et l’innovation pour seulement un acheteur sur quatre (26 %). La perception des directeurs achats est bien plus optimiste. Ils sont 91 % à revendiquer une action décisive sur la performance financière, 75 % pour ce qui est de la RSE, 72 % sur la maîtrise des risques et 46 % sur le BFR.
Sur quels axes de performance avez-vous une action décisive ?
Quand on leur demande de juger le degré de sophistication dans leurs relations fournisseurs, acheteurs et directeurs achats traduisent cette même différence de vision. Les acheteurs sont 33 % à considérer n’en être qu’au stade de la négociation et de la mise en concurrence ce qui n’est le cas que de 8 % des directeurs achats. « Ces données semblent indiquer que beaucoup d’acheteurs sont trop focalisés sur les actions au jour le jour et peinent à prendre de la hauteur », suggère Tristan Berthod.
A quel niveau considérez-vous la qualité de vos relations avec vos fournisseurs ?
Interrogés sur le fait que leurs missions soient conformes ou non à leurs attentes, les acheteurs sont également les plus sévères. 31 % considèrent que ce n’est pas le cas en matière d’impact business et 43 % en matière d’innovation. « Ce constat que l’on retrouve dans le Baromètre à chaque fois que la question de l’innovation est abordée est un peu inquiétant, sachant que certains sujets liés à l’innovation, tels que l’IA générative seront des clés pour demain », estime Tristan Berthod. Sur ce point, même en bénéficiant d’une vision plus stratégique, les directeurs achats ne sont guère plus optimistes : 30 % d’entre eux estiment également que leurs missions ne sont pas en accord avec leurs aspirations en matière d’innovation.
Les missions que l’on vous confie aux Achats sont-elles en accord avec vos aspirations en matière de…
Petite alerte également sur la question du sens : un acheteur sur quatre (25 %) ne s’y retrouve pas, de même que sur l’impact business (31 %) et sur la variété des tâches (24 %). Des sujets à suivre pour les managers soucieux d’embarquer et de motiver leurs équipes.
sur toutes les dimensions ESG de leur mission tels que l’environnement et l’éthique, les acheteurs sont finalement, dans leur grande majorité, à l’aise avec les missions qui leur sont confiées
Voilà pour la partie verre à moitié vide. Tristan Berthod, pour sa part, préfère voire l’autre face de la médaille : « En réalité, sur toutes les dimensions ESG de leur mission tels que l’environnement et l’éthique, les acheteurs sont finalement, dans leur grande majorité, à l’aise avec les missions qui leur sont confiées ».
En ce qui concerne la fréquence des relations entre la direction achats et les autres fonctions, c’est cette fois l’échantillon du panel issu de l’industrie qui affiche une longueur d’avance. Près de la moitié déclarent avoir des relations fréquentes avec la DG (44 %), 56 % avec la DAF et 67 % avec la direction des Opérations. Dans les entreprises de services la proportion de directeurs achats revendiquant des relations fréquentes avec la DG tombe à 35 %.
Quel est votre degré de collaboration avec ces différences fonctions ?
Interrogés sur l’existence d’injonctions contradictoires, la quasi-unanimité du panel porte à croire qu’elles sont constitutives de la fonction achats à tous les niveaux. Acheteur comme directeurs achats de l’industrie autant que des services dénoncent des injonctions contradictoires entre temps court et temps long (60 %), savings et RSE (49 %), fidélisation des fournisseurs stratégiques et savings (34 %).
Pour Tristan Berthod, ce premier tableau révèle des défis à relever par le management de la fonction achats pour gagner en impact.
« Injonctions contradictoires, quête de sens, tête dans le guidon, manque de recul, tout ça laisse penser que l’acheteur est partout et nulle part. Y a-t-il une nécessité de bien clarifier, préciser, la feuille de route et les objectifs que les directions achats fixent à leurs équipes : dans le temps : Court terme vs moyen/long termes ; sur les différents streams : Performance financière, ESG, Innovation ; sur leur relations : internes avec les business partners, externes avec les fournisseurs », interroge l’expert achats de KPMG.
Rendez-vous le mercredi 31 janvier pour la suite de cette plongée dans l’opinion des professionnels des achats avec cette fois un focus sur les outils, avec une réponse à cette question : dans quelle mesure aident-ils les acheteurs à exécuter leur tâche ?