Tendances achats 2022 : Près de la moitié des directions achats tentées par la relocalisation
Par Guillaume Trecan | Le | Consultant
Le traditionnel sondage Tendances Achats réalisé par le cabinet AgileBuyer depuis treize ans et réalisé en partenariat avec le CNA depuis 2018, s’est imposé comme le baromètre de la profession. Les résultats s’appuient cette fois sur les réponses de 893 professionnels des achats interrogés entre le 16 novembre et le 2 décembre.
Dans le climat d’inflation et de désordre sur le fret international, voire de pénuries qui caractérise la fin 2021 et marquera sans doute une bonne partie de 2022, les priorités achats telles qu’elles ressortent de cette étude sont inédites et, à première vue, les Achats ne sont pas à la fête : 68 % des personnes interrogées indiquent en effet que leur direction achats a subi des pénuries et 65 % que ces pénuries ont impacté la marge de leur entreprise. Les pénuries subies concernent en premier lieu les métaux (23 %), les matières premières hors métaux (17 %), l’électronique (14 %), l’IT (13 %) et le transport (12 %).
Les difficultés de livraison impactent les entreprises au plus haut niveau puisque 79 % des personnes interrogées anticipent ou vivent déjà des difficultés de livraison avec leurs fournisseurs stratégiques.
Plus de relocalisations et moins d’économies
Cette situation va impacter en profondeur les stratégies d’achats : 47 % du panel considèrent que les crises vont les pousser à relocaliser, une opinion que seuls 16 % du panel partageaient fin 2019 et 30 % fin 2020. Le concept de Made in France y gagne du même coup un peu plus de popularité : 61 % des directions achats considèrent le Made in France ou achat local dans leurs critères d’attribution de business contre 53 % fin 2018.
Est-ce que cette réorientation des politiques achats ira jusqu’à changer la nature même de la fonction ? Peut-être, si l’on considère que seuls 26 % des professionnels achats considèrent cette année qu’ils seront attendus par leur direction sur les économies réalisées, contre 55 % en 2020.
Pourtant, il risque d’y avoir d’intenses discussions lors des entretiens individuels de fin d’année 2022, car si les réductions de coûts seront très difficiles à obtenir dans la conjoncture actuelle, les économies réalisées restent le principal critère de mesure de la performance achats (60 %), très loin devant la réactivité (9 %), la contribution au chiffre d’affaires (8 %), ou encore la RSE (4 %).
La RSE dans les objectifs personnels
Mais le fait est que la RSE a acquis une importance jamais vue dans les objectifs achats. En 2022, 58 % des professionnels achats auront des objectifs personnels liés au développement durable ou la RSE. Dans le secteur du luxe et de la mode, ce chiffre monte même à 100 %, à 79 % dans le secteur tourisme et transport, à 71 % dans la banque assurance.
L’amélioration de l’empreinte carbone en particulier est l’axe principal de contribution des achats à la stratégie RSE de l’entreprise, pour 73 % des professionnels achats, loin devant l’économie circulaire (36 %) et la territorialité (33 %). Ainsi 61 % des directions achats se sont fixé des objectifs en matière de réduction de l’empreinte carbone et se sont engagés dans des actions dans ce sens.
Là encore, apparaît un décalage entre les objectifs et la réalité, car 77 % des entreprises ne mesurent pas l’empreinte carbone de leurs fournisseurs et 75 % ne connaissent pas l’empreinte carbone de leurs achats.
Mobilisation pour les délais de paiement
Concernant le respect des délais de paiement des fournisseurs, une question que la crise sanitaire a remise à un niveau de sensibilité très élevé, voire vital pour bon nombre d’écosystèmes fournisseurs, si cela fait partie des objectifs de 83 % des personnes interrogées, c’est une cause plus en vogue dans les grandes entreprises. Ainsi 71 % des personnes interrogées issues de grandes entreprises déclarent que le respect des délais de paiement fournisseurs « fait partie de leurs combats en interne », contre 57 % dans les entreprises de moins de 249 salariés. Logique, si l’on prend en compte le fait que, comme l’a encore rappelé dernièrement l’Observatoire des délais de paiement, les retards de paiement sont moins le fait des PME que des grands groupes.
Enfin, plus de la moitié des entreprises (51 %) se sont engagées dans une démarche de labellisation ou envisagent de le faire.
Nature du panel
Les 893 professionnels des achats ayant fourni des réponses complètes sont répartis entre environ un tiers de directeurs achats, un tiers de responsables achats et un tiers d’acheteurs. Pour près de la moitié (44 %), il s’agit de professionnels achats de grands groupes (plus de 5 000 salariés).