Les défaillances d’entreprise toujours plus nombreuses
Par Mehdi Arhab | Le | Éthique et conformité
L’année 2023 a été particulièrement rude pour les entreprises françaises, en particulier les PME et TPE. Un peu plus de 57 000 entreprises ont fait défaut en France, soit une hausse de plus de 35 % selon les données publiées tout récemment par Altares. La phase de normalisation se poursuit et, évidemment, rien n’indique qu’elle s’estompera, bien au contraire.
Le nombre de défaillances d’entreprise sur l’année 2023, par rapport à l’année 2022, est en nette augmentation. Cette nouvelle était redoutée certes, mais surtout attendue. Avec 57 729 procédures ouvertes sur l’année 2023, le nombre de défaillances a augmenté de près de 36 % par rapport à l’année 2022. Une hausse particulièrement marquée, mais bien moins que celle enregistrée en fin d’année 2022 (+ 49 % vs 2021). Le dernier trimestre de l’année 2023 est en somme particulièrement révélateur des difficultés rencontrées par les acteurs économiques depuis près de quatre ans désormais. Quelque 16 800 entreprises ont fait défaut sur cette seule période. Un niveau jamais vu depuis 2012-2013, preuve de la sévérité de la situation.
« Au regard du contexte inédit de « permacrise » dans lequel les entreprises naviguent depuis 4 ans, les seuils de défaillances, s’ils sont élevés, ne sont pas une surprise », écrit Altares dans son étude. Et les insuffisances financières des entreprises sont telles que la courbe n’est pas près de s’inverser. Là encore, la situation des PME est particulièrement préoccupante. Elle se dégrade très fortement, trop fortement, encore et encore. La proportion de PME parmi les entreprises qui défaillent est depuis trois ans en nette augmentation et si une grande majorité des défauts des micro-entreprises et des TPE, les défaillances de premières augmentent presque tout aussi vite. L’augmentation des défaillances est d’ailleurs particulièrement forte chez les PME de plus de 100 salariés. Un peu plus de 170 ont défailli en 2023 contre 95 en 2022 soit une envolée de + 80 % sur un an. Toutefois, les chiffres bruts sont bien différents, puisqu’avec plus de 52 000 procédures ouvertes, les TPE concentrent l’essentiel (92 %) des jugements.
Des chiffres alarmants
Par ricochet, ce nombre de défauts va de fait alimenter la remontée du chômage ; plusieurs dizaines de milliers d’emplois sont menacés. Pour Altares, qui estime que 243 000 emplois directs sont ou ont été menacés en 2023, les difficultés rencontrées par les PME pénalisent « excessivement le nombre des emplois susceptibles d’être impactés ». Aucun secteur ne parvient à endiguer le phénomène. Et certains souffrent comme rarement. Le secteur de la construction rassemble 24 % des faillites et cumule désormais plus de 14 000 défauts, dont près de 11 000 dans les seules activités du bâtiment. En tout et pour tout, 14 112 entrepreneurs ont obtenu l’ouverture d’une procédure, soit une hausse de plus de 40 % sur un an. Après avoir résisté pendant un long moment, le voilà qu’il rentre donc dans le rang. Le secteur industriel vit lui aussi une période particulièrement difficile. Pour ce qui concerne les activités de manufacture, les défaillances ont augmenté de près de 24 % sur un an, fragilisées plus particulièrement par le textile-habillement. Dans l’industrie agroalimentaire, le dérapage est encore plus conséquent, la hausse étant de 37 %.
Le transport continue sur la même voie : celle de la dégringolade. Plus de 2 300 transporteurs ont défailli en 2023, un nombre conséquent. Mais la hausse, de 30 %, est inférieure à la moyenne générale. La tendance est toutefois bien plus inquiétante pour le transport routier de marchandises qui compte plus de 1 500 défaillances, soit une hausse de 40 %. « La situation s’est fortement dégradée en fin d’année avec une augmentation de 63 % tirée par l’interurbain (+71 %) plus que par le fret de proximité (+59 %) », note Altares. Dans les services aux entreprises, la situation n’est guère plus reluisante. La tendance est la même que la moyenne générale (+ 36 % sur une année). La situation des entreprises de télécommunication est néanmoins extrêmement préoccupante, puisque la hausse atteint 155 %. Un chiffre qu’Altares qualifie « d’affolant ». Et c’est le moins que l’on puisse dire.
En somme, l’avenir reste incertain et les prévisions de croissance, revues récemment à la baisse par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, ne vont rien arranger, bien au contraire. Les trésoreries des entreprises sont malmenées et cela continuera, sans aucun doute. L’année 2022 avait été particulièrement lourde, 2023 aussi. Quid de 2024 désormais ?