Un guide pour acheter des masques français ou européens
Par Guillaume Trecan | Le | Ha inclusif
Le ministère de l’industrie vient d’éditer un « Guide des bonnes pratiques et leviers d’action pour garantir la sécurité des approvisionnements », destiné à favoriser une offre française et européenne dans les achats publics et privés.
Sensibilisé à la criticité des achats hospitaliers - en particulier des masques sanitaires, gants et équipements de protection individuelle - le ministre de la santé Olivier Véran et la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher ont déjà effectué un travail de fond pour inciter à la relocalisation d’unités de production. Pour sécuriser les approvisionnements de meltblown, une matière filtrante utilisée pour fabriquer les masques, l’Etat a par exemple soutenu dix projets industriels à hauteur de 30 % des investissements, ce qui a permis de faire passer le nombre de producteurs français de de quatre à dix en deux ans.
C’est cette fois sur la question de la demande que se penchent Olivier Véran et Agnès Pannier-Runacher, en particulier celle des acheteurs publics, moins à même de favoriser une localisation des produits achetés sur le territoire national ou communautaire.
Des leviers pour favoriser des productions de proximité
Par ce Guide, l’Etat incite très clairement les acheteurs privés à recourir à des critères de localisation de la production en France ou en Europe dans leurs appels d’offres, notamment pour sécuriser leurs approvisionnements. Un luxe que ne peuvent pas se permettre des acheteurs publics. L’article L. 2112-4 du Code de la commande publique leur permet cependant d’exiger une localisation sur le territoire européen « afin de prendre en compte des considérations environnementales ou sociales ou d’assurer la sécurité des informations et des approvisionnements. »
« L’acheteur public ne peut pas exiger que les soumissionnaires disposent d’antennes de production et d’un approvisionnement en matières premières au sein de l’Union européenne au moment de la remise des offres. Il peut cependant exiger en tant que clause d’exécution que le titulaire s’engage à disposer de telles capacités de production et d’approvisionnement avant le début de l’exécution du contrat », précisent les auteurs de ce guide. Toujours pour sécuriser les approvisionnements, les acheteurs publics peuvent également se renseigner sur l’existence de contrats d’approvisionnements en matières avec des fournisseurs implantés sur le territoire de l’Union européenne.
Accroître le niveau des exigences qualité et des certifications
Distribué aux présidents de conseil régionaux et départementaux et aux intercommunalités, ainsi qu’aux acheteurs privés des secteurs de la distribution et du commerce notamment, ce guide regroupe également une série de recommandations propres à garantir la qualité du produit et de l’exécution du contrat… sachant que ces exigences sont de nature à resserrer le spectre du sourcing vers des fournisseurs français ou européens.
L’acheteur pourra exiger, en tant que condition d’exécution du contrat, que l’étiquetage et les conditions d’utilisation soient rédigés en langue française
Les auteurs du Guide recommandent notamment d’exiger des documents, certification et étiquetage en langue française. « L’acheteur pourra exiger, en tant que condition d’exécution du contrat, que l’étiquetage et les conditions d’utilisation soient rédigés en langue française et soient conformes aux normes en vigueur ; chaque emballage primaire devant notamment comporter le nom et l’adresse du fabricant, la désignation en clair du produit, le numéro d’identification unique et/ou la référence du dispositif, le numéro de lot de fabrication, la date de péremption, et le marquage CE », indiquent les auteurs du rapport.
En ce qui concerne les masques chirurgicaux, outre le marquage CE, la norme harmonisée NF EN 14683 peut être exigée. Les acheteurs peuvent aussi demander la preuve que les produits ont été déclarés et enregistrés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Une attention particulière peut être portée aux matériaux utilisés pour la fabrication des masques. Un acheteur est ainsi en droit d’exiger des documents prouvant qu’ils sont conformes à la réglementation européenne. Les masques FFP doivent quant à eux être homologués par l’Apave. L’acheteur peut aussi exiger les certifications ISO 9001 ou 13 485 pour les masques chirurgicaux et ISO 22301 relatives au système de management de la qualité pour l’exécution du marché.
Les auteurs du guide listent également tout ce qu’il est possible de faire et d’exiger en matière de contrôle qualité et d’audit sur site, en associant ces vérifications à des mesures de rétorsion. Reste aux directions achats à juger par elle-même si une telle débauche de moyens se justifie pour l’achat d’un accessoire qui, pour être indispensable aujourd’hui, demeure une commodité.