Capgemini : « Nous souhaitons nouer un lien de proximité et de confiance avec les indépendants »
Par Guillaume Trecan | Le | Prestations intellectuelles
Cet article est référencé dans notre dossier : Dossier spécial HA Prestations Intellectuelles : des clés pour gérer une famille d’achats sensible
Jérémy Labbe, directeur achats France, Maroc, Tunisie de Capgemini et Anne Milot, responsable du programme Freelancer Gateway By Capgemini expliquent l’initiative du groupe de construire sa propre plateforme de Freelances pour disposer d’un pool d’experts indépendants qui ont fait leurs preuves.
En quoi consiste le programme Freelancer Gateway by Capgemini grâce auquel vous sourcer des indépendants ?
Anne Milot : Capgemini a souhaité constituer un réseau de talents indépendants pour mener à bien ses projets et s’assurer que nous apportons le plus haut niveau de services à nos clients. Dans ce cadre, nous avons lancé la plateforme « Freelancer Gateway by Capgemini » qui permet à tout indépendant de venir créer son profil et recevoir des notifications quand une mission pourrait les intéresser. Les indépendants ont la possibilité de venir y consulter toutes les offres disponibles en temps réel et prendre contact avec nos équipes pour avoir plus d’informations si nécessaire. Le marché du travail ayant évolué, il était nécessaire d’adapter notre approche pour continuer à conserver les talents et expertises chez Capgemini. La plateforme « Freelancer Gateway by Capgemini » existe également dans d’autres pays, et ce depuis plusieurs années. En France, le lancement a eu lieu fin 2022.
La vocation première de la plateforme n’est pas d’accumuler les profils mais de constituer un pool d’indépendants actifs
Combien y a-t-il de profils sur Freelancer Gateway ?
Jeremy Labbe : A ce jour, nous avons plusieurs milliers de profils actifs mais il est important de préciser que la vocation première de la plateforme n’est pas d’accumuler les profils mais de constituer un pool d’indépendants actifs, de talents ayant des compétences clés ayant qui ont déjà travaillé avec nous, qui ont fait leurs preuves et que nous pouvons activer comme un véritable réseau. Au travers de la plateforme, nous véritablement nouer un lien de proximité et de confiance avec les indépendants afin de que cela bénéficie directement à nos projets et à nos clients.
AM : Ce sont des profils chassés par notre équipe pour des compétences précises. Dès leur inscription sur la plateforme, ils font l’objet d’un processus de qualification et d’accompagnement traité par une personne qui leur est dédiée. Le fait qu’il s’agisse d’une communauté restreinte nous permet d’avoir avec eux des contacts téléphoniques réguliers.
Comment l’offre de cette plateforme s’articule-t-elle avec celle des autres acteurs des prestations intellectuelles avec lesquels vous travaillez ?
JL : Notre plateforme est parfaitement intégrée avec l’ensemble de notre écosystème. En fonction de la compétence recherchée et de sa localisation, nous adressons une demande à un panel de fournisseurs dans lequel on retrouve notre plateforme Freelancer Gateway mais également d’autres plateformes d’indépendants et/ou des ESN spécialisées par compétences ou par localisation. Capgemini a des clients dans toutes les régions françaises, nous nous devons donc d’avoir une méthodologie de sourcing extrêmement fine afin de trouver des solutions dans des villes de différentes tailles, où le marché n’y est pas aussi dynamique qu’en Île de France par exemple. De ce fait, nous avons besoin d’une grande diversité de partenaires qui sont parfaitement complémentaires à Freelancer Gateway.
Le contexte économique incertain et la conjoncture qui s’est durci font apparaitre avec force les enjeux autour de la rentabilité pour certaines plateformes de freelances
Qu’est-ce que vous attendez des plateformes d’intermédiation avec les freelances ?
JL : Le contexte économique incertain et la conjoncture qui s’est durci font apparaitre avec force les enjeux autour de la rentabilité pour certaines plateformes de freelances. Pour certains acteurs, il est donc urgent de trouver un business model équilibré. Certains acteurs se sont développés sur des activités de portage, salarial ou commercial, mais peu d’acteurs restent sur cette thématique pour laquelle la marge brute est faible, à moins de travailler sur des volumes importants.
De plus en plus de sociétés diversifient leurs activités (VMS, recrutements en CDI, sourcing…) afin d’être plus résilientes. Nous concernant, nous travaillons avec des plateformes spécialisées qui se positionnent sur des segments d’activités précis.
Quel est votre regard sur l’évolution conjoncturelle des tarifs des freelances ?
AM : Nous constatons un ralentissement qui a tendance à décaler les projets dans le temps, à allonger un peu les délais, à décaler les sprints lorsque l’on est en mode agile. Les freelances en mission ont également beaucoup moins tendance à changer de mission. C’est un marché très fluide. Les meilleurs profils sont aussi capables de basculer de freelance à salarié pour s’adapter à la dynamique du marché.
En prenant régulièrement le pouls de notre communauté, nous souhaitons nous assurer de rester attractifs
Comment faites-vous en sorte d’attirer les meilleurs, au-delà du seul levier des tarifs ?
JL : C’est tout l’enjeu. Nous avons la chance de travailler sur des projets de transformation innovants, structurants et très ambitieux, c’est un environnement extrêmement stimulant pour les talents qui souhaiteraient nous rejoindre.
Au-delà de cet aspect et grâce à la proximité que nous avons su développer avec certains indépendants, nous les sollicitons régulièrement pour comprendre quelles sont leurs attentes et quels seraient les services additionnels dont ils auraient besoin. En prenant régulièrement le pouls de notre communauté, nous souhaitons nous assurer de rester attractifs.
AM : Ils ont avant tout besoin d’être traités comme des indépendants. Ce qu’ils demandent, dans la grande majorité des cas, c’est d’avoir des réponses de façon réactive et fluide, avec les bonnes informations. Ils mettent également l’accent sur les paiements. Ils n’ont pas la trésorerie d’une ESN, ils doivent donc être payés très rapidement.
Est-ce que gérer les flux de paiement des indépendants représente une difficulté particulière ?
JL : C’est effectivement un sujet compliqué et sensible car le fond de roulement d’un indépendant n’est pas similaire à celui d’une société. Nous travaillons activement sur ce sujet car il s’agit d’un vecteur important d’attraction et de rétention des talents indépendants.
Ce qui génère l’intérêt de l’indépendant, c’est la discussion qui s’engage ensuite avec l’indépendant sur la mission
Travailler sur l’expression du besoin peut-il aussi vous aider à rendre vos marchés plus attractifs ?
JL : C’est un véritable défi. Lorsque l’on travaille sur les prestations intellectuelles, évidemment, on parle d’humains. Mais les outils ont fatalement tendance à déshumaniser le process. Nous demandons au prescripteur de mettre son besoin noir sur blanc, avec le service et les livrables attendus, alors que, in fine, ce qu’il recherche, c’est avant tout une compétence, un feeling avec une personne. Nous pouvons nous efforcer de rendre l’outil le plus attractif possible. Mais ce qui génère l’intérêt de l’indépendant, c’est la discussion qui s’engage ensuite avec l’indépendant sur la mission.
AM : la chance que nous avons avec les indépendants inscrits sur notre plateforme c’est que beaucoup d’entre eux nous connaissent assez bien pour deviner qui est le client final et quelle est la mission. Dans les cas où le besoin n’est pas clair, nous pouvons aller le requalifier avec l’acheteur ou avec le manager.