Club des Managers Achats : la révolution de la mobilité à deux vitesses
Par Guillaume Trecan | Le | Mobilités
La mobilité professionnelle connait une situation paradoxale avec, côté voyages d’affaires, de nouvelles pratiques de sobriété intégrées par les collaborateurs et, côté flottes automobile, un rapport aux véhicules - notamment de fonction - qui peine à évoluer. L’offre limitée des constructeurs n’aide pas à accélérer cette transition.
Jusqu’où la sobriété va-t-elle impacter la mobilité ?
La pratique de la visio et la généralisation du télétravail ont bien sûr bouleversé les déplacements professionnels. Les collaborateurs se déplacent beaucoup moins et de manière plus raisonnée. Conscients de l’empreinte carbone de leurs voyages d’affaires, peut-être, du temps perdu dans les transports dans des emplois du temps tendus, plus sûrement, ils s’interrogent systématiquement sur la nécessité d’un déplacement avant de l’entreprendre. Pour des directions achats soucieuses de maîtriser les coûts c’est évidemment un avantage. A ceci près que beaucoup de directeurs achats présents au dîner du Club des Managers Achats du mercredi 31 mai ressentent les limites de cette tendance dans leur rôle de manager de ressources internes et de ressources externes. Pour piloter des fournisseurs dans un contexte de fortes tensions, il peut être utile d’aller voir sur place.
A quel coût peut-on décarboner sa flotte ?
Cette sobriété n’a pas forcément atteint la gestion des flottes d’entreprise, sommées de s’engager sur la voie de la décarbonation. Une voie semée d’embûches pour des directions achats qui subissent les choix et les contraintes de l’industrie automobile. La directrice achats d’une ETI va devoir annoncer au DG du groupe que son véhicule de fonction n’arrivera que dans une dizaine de mois. Une de ses consœurs, à la tête de la direction achats d’une société de transport et logistique constate avec effroi que les camions électriques dont elle a équipé sa flotte ne tiennent par leur promesse en termes d’autonomie. Beaucoup d’autres, également soulignent le coût très élevé d’équipements en bornes de recharge des parkings. Le directeur achats non marchands d’une entreprise de grande distribution évoque son choix de prendre en charge une part du coût d’équipement des bornes de recharge jusqu’au domicile de ses collaborateurs.
Quelle évolution pour le véhicule de fonction ?
Le geste n’est pas anodin si l’on considère que la relation des collaborateurs à leur véhicule de fonction n’évolue qu’à la marge. La possession d’un véhicule de fonction reste perçue comme le marqueur d’un statut enviable dans l’entreprise. Si certains collaborateurs issus des nouvelles générations et au mode de vie urbain préféreraient transférer en salaire le bénéfice de leur véhicule de fonction, les directeurs achats présents autour de la table sont unanimes lorsqu’ils font les comptes : cette augmentation de salaire n’est guère soutenable pour l’employeur. Et ceux qui y consentiraient créeraient ainsi un déséquilibre de traitement difficile à justifier entre anciennes et nouvelles générations.
Quel est l’avenir du crédit mobilité ?
En théorie, le crédit mobilité correspond à la différence entre le coût de la voiture de fonction et celui de la (ou des) alterantive(s) choisies par le salarié. En pratique, cette enveloppe à sa disposition pour prendre en charge ces alternatives, comprise entre 3 000 et 10 000 euros, ne couvre qu’une part seulement de la valeur du véhicule de fonction. Le crédit mobilité reste pour autant le dispositif le plus généreux. Le forfait mobilité durable, par exemple, est plafonné à 800 euros par an, exonérés d’impôts et de cotisations sociales.
Pourtant, il ne faut pas renoncer à offrir à ses collaborateurs la possibilité de se déplacer autrement selon leurs préférences : transport en commun, véhicule de location, autopartage, vélo électrique… La responsable achats mobilités d’un grand groupe du secteur banque-assurance donne une idée de l’enjeu : satisfaire environ 10 % des collaborateurs. Dans un contexte de tension sur les recrutements, peu d’entreprise peuvent négliger les besoins d’une telle proportion de leurs salariés.
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