Solution et techno

Schneider Electric : « Il n’existe pas d’outils de pilotage global des achats responsables »

Par Guillaume Trecan | Le | Décisionnel

Christophe Quiquempoix, le VP Global Sustainable Procurement de Schneider Electric présente les outils avec lesquels il pilote sa trajectoire achats responsables : un SRM et des plateformes développées ou acquises par Schneider Electric. Il interviendra comme Grand Témoin, lors des HA Days Responsables des 7 et 8 mars à Deauville sur l’atelier #Outils : bien mesurer pour piloter ses objectifs RSE, le 8 mars à 10h30.

Christophe Quiquempoix, VP Global Sustainable Procurement de Schneider Electric - © D.R.
Christophe Quiquempoix, VP Global Sustainable Procurement de Schneider Electric - © D.R.

Existe-t-il des outils dédiés de pilotage des achats responsables ?

Tout dépend de ce dont on parle. Si l’on parle d’outils de mesure de la performance ESG, il en existe beaucoup, des outils tels qu’Ecovadis, RBA (Responsible business alliance), ou encore Sedex. Nous en avons identifié une douzaine. En revanche, il n’existe pas d’outils de pilotage globale des achats responsables. C’est pourquoi nous avons développé les nôtres.

Nous nous appuyons aussi sur l’outil de décarbonation Zeigo, acquis par Schneider Electric en 2022

Pouvez-vous nous décrire ces outils que vous avez développés ?

Nous nous appuyons tout d’abord sur les modules SRM de Synertrade. C’est l’outil central de management de nos fournisseurs avec lequel nous gérons nos contrats, nous conduisons des actions de communication de masse, nous menons des e-RFQ, des e-RFP, des enchères inversées… Au sein de ce SRM, nous avons développé un module sur lequel le fournisseur entre ses informations de déclaration d’émissions carbones, ainsi que les informations relatives au travail décent.

Nous nous appuyons aussi sur l’outil de décarbonation Zeigo, acquis par Schneider Electric en 2022. Avec le portail digital Zeigo Hub, nous partageons avec nos fournisseurs toutes les informations dont ils ont besoin pour décarboner, les outils de calcul d’empreinte carbone, des vidéos de formation, des références d’article, etc. Nous avons également développé Zeigo Activate, un software spécifique pour accompagner les PME dans la décarbonation. C’est un outil qui permet de mesurer de façon très simple l’empreinte carbone d’un site (par exemple en scannant une facture d’électricité), il aide le fournisseur à se fixer des objectifs intermédiaires par rapport à sa cible net 0, il recommande des actions et le niveau de décarbonation associés à ces actions, enfin il propose une marketplace d’experts pertinents pour exécuter les actions recommandées.

Nous préférons demander à nos fournisseurs de dépenser leur énergie à décarboner plutôt qu’à rechercher la mesure la plus exacte de leur empreinte carbone

Comment abordez-vous la question de la fiabilité des critères de mesure concernant les objectifs achats responsables ?

Beaucoup d’entreprises se focalisent sur la mesure de l’empreinte carbone. Nous préférons demander à nos fournisseurs de dépenser leur énergie à décarboner plutôt qu’à rechercher la mesure la plus exacte de leur empreinte carbone. L’expérience qu’ils vont acquérir dans l’action leur permettra d’être meilleur dans le calcul de l’empreinte carbone. Imposer le SBTI à ses fournisseurs, ce n’est pas agir. Or, le but c’est bien d’agir, de décarboner. Nous ne sommes peut-être pas certains que notre mesure est parfaitement correcte. En revanche, nous sommes sûrs que nos fournisseurs émettent beaucoup moins de carbone aujourd’hui qu’hier. Les faire travailler sur la décarbonation leur fait acquérir une compétence dans ce calcul bien plus grande.

La première marche doit être abordable pour tous les fournisseurs, y compris des PME

Quelle cible leur fixez-vous ?

Les sociétés prennent souvent ces questions de décarbonation par le mauvais bout. Pour engager le fournisseur dans une logique de décarbonation, il ne faut pas lui présenter sous l’angle de la contrainte. Lorsque nous avons commencé cette démarche chez Schneider Electric, elle était totalement nouvelle pour 70 % de nos fournisseurs. Ils ne savaient pas calculer leur empreinte carbone. Si nous leur avions demandé de s’aligner sur notre propre engagement de réduction de 50 % de l’empreinte carbone, très peu nous auraient réellement suivi. Nous avons pris le risque de leur dire de participer au programme en fixant leur propre cible. Cela nous a permis de les engager. C’est ensuite que nous avons travaillé ensemble à améliorer leur cible. La première marche doit être abordable pour tous les fournisseurs, y compris des PME.

Sans certitude sur les critères de mesure, comment êtes-vous certains que leurs actions vont dans le bon sens ?

Nous nous sommes demandé, au début de notre programme, si nous devions auditer les déclarations carbone de nos fournisseurs et nous avons finalement pris un parti simple : plutôt que de dépenser notre énergie dans cette démarche d’audit, nous demandons à nos fournisseurs de prendre publiquement position sur les chiffres qu’ils déclarent dans notre système ; qu’ils les publient sur leur site web, dans leur rapport annuel ou le rapport développement durable ou à CDP. Nous nous assurons ainsi que ce chiffre est le meilleur qu’ils puissent nous donner. De notre côté, nos engagements sont audités par une société externe, au même titre que nos résultats financiers.

Comment déclinez-vous cette approche pour les autres sujets de la RSE ?

Cette méthode est valable pour toutes les autres dimensions de la RSE. Nous l’appliquons pour nos actions de réduction du packaging, de recours à des matières biosourcées, ou encore nos engagements en matière de travail décent. Le but étant de faire en sorte que la première marche d’entrée soit la moins haute possible pour engager tous nos fournisseurs. Nous avons défini trois niveaux : basique, intermédiaire et expert. Au niveau basique, sur les 67 points que nous vérifions, nous demandons par exemple que les salaires de leurs employés soient au niveau du Living Wage, un salaire qui permet à un employé de faire vivre sa famille de manière descente. En moyenne, le minimum légal des pays ne représente qu’un tiers du Living Wage. Nos fournisseurs au niveau basique doivent avoir une Living Wage policy et nous en envoyer une copie. Nous ne vérifions qu’elle est appliquée qu’aux niveaux intermédiaire et expert, mais nous avons commencé à semer une graine dans la tête des fournisseurs sur cette notion que la plupart ignorent.

 Lien d’inscription pour les HA Days Responsables

Le programme des ateliers-débats