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Segmentation et soft skills : deux boîtes à outil pour factualiser les achats de conseil

Par Guillaume Trecan | Le | Prestations intellectuelles

La commission achats de Syntec conseil vient d’éditer deux outils complémentaires pour aider les acheteurs à évaluer les prestations de conseil de manière objective : un référentiel de la segmentation des prestations de conseil et un listing des soft skills.

Segmentation et soft skills : deux boîtes à outil pour factualiser les achats de conseil
Segmentation et soft skills : deux boîtes à outil pour factualiser les achats de conseil

Depuis 2004, la Commission achats de Syntec Conseil cultive le dialogue entre consultants et acheteurs. Ce think tank réunit une cinquantaine personnes, pour moitié des consultants et pour moitié des acheteurs mobilisés par le Conseil national des achats, sous le regard également du Médiateur. Pour nourrir la réflexion de ses membres ce groupe de bonnes volontés propose, notamment depuis 2009 un Baromètre des achats de conseil, destiné à prendre le pouls de la relation mis à jour tous les deux ans, le dernier ayant été publié en décembre 2022.

Bertrand Maguet - © D.R.
Bertrand Maguet - © D.R.

La segmentation, est une sorte de serpent de mer que nous avons rencontré régulièrement dans le conseil

                                                                     

La fin d’un « serpent de mer »

Deux nouveaux outils viennent d’être créé par la commission achats de Syntec : un référentiel de la segmentation des cabinets de conseil et un autre des soft skills. « La segmentation, est une sorte de serpent de mer que nous avons rencontré régulièrement dans le conseil. Pendant longtemps, les consultants ont essayé de fournir aux acheteurs les segmentations idéales. Lorsqu’un consultant répond à un appel d’offres de référencement, il doit démontrer sa capacité à exécuter la mission par rapport à une segmentation et chaque donneur d’ordres a sa façon de voir les choses », rappelle Bertrand Maguet, président de la commission achats de conseil de Syntec conseil. Pour ce dernier, le niveau d’incompréhension a pour conséquence directe des appels d’offres inefficaces.

« Depuis des années, au sein de la Commission achats, des acheteurs reprochent aux consultants de ne pas comprendre ce qui leur est demandé dans les appels d’offres et de recevoir des offres avec des écarts de prix de facteur cinq. Les consultants leur rétorquant que ces écarts sont le résultat de cahier des charges mal conçus », déplore Bertrand Maguet.

Plutôt que d’établir un référencement par expertises sectorielles (finances, achats, supply chain, RH…), la commission a fait le choix d’établir un référencement en partant des différentes typologies de livrables produits par une mission de conseil pour ensuite les compléter par des critères de types de missions et d’expertises, intégrant également les soft skills. « Le seul sujet sur lequel tous les consultants et tous les acteurs se retrouvent ce sont les livrables », éclaire Bertrand Maguet. Dans son document, Syntec Conseil liste donc des livrables (diagnostic, analyse, recommandation, road map d’implémentation), des enjeux (transformation des organisations, optimisation cout compétitivité, amélioration des processus, impact ESG), des fonctions concernées (présidence, direction stratégie, comex et directions fonctionnelles, directions opérationnelles) et des soft skills.

Plusieurs acheteurs membres de la commission ont déjà utilisé ces référentiels pour créer des grilles de sélection, ministère de la Défense, Société générale, SNCF… Libre à chacun à partir de cette grille en combinant et en pondérant les différents critères comme ils l’entendent.

Avoir une approche plus rationnelle de tous ces éléments qui, par définition, sont plus émotionnels

Des soft skills aussi précieuses que pour un recrutement

En listant les soft skills attendues de la part d’un prestataire de conseil, la commission s’est positionnée dans une optique de gestion des ressources externes comme le ferait un recruteur, cultivant l’ambition d’« avoir une approche plus rationnelle de tous ces éléments qui, par définition, sont plus émotionnels. » La question que la commission achats du Syntec a voulu résoudre est celle des qualités collectives attendues d’une équipe de consultants par un donneurs d’ordres : force de conviction, adaptabilité, intelligences sociales… « Le fait d’avoir des consultants en recrutement dans la réflexion nous a beaucoup aidé dans notre travail sur les soft skills  », note Bertrand Maguet. Le président de la Commission achats rappelle que Syntec Conseil est le résultat de la fusion de quatre syndicats : consulting, études, communication, conseil en recrutement et conseil en évolution professionnelle. Syntec Conseil regroupe une centaine d’entreprises, représentant 80 % du chiffre d’affaires de la profession en termes de conseil en management.

« Si vous établissez un bon portrait-robot du collectif que vous recherchez, vous avez plus de chance d’avoir le collectif qui correspond à votre besoin. Avec un cabinet de Conseil en stratégie, le client demandera à l’équipe de l’adaptabilité, de l’intelligence collective, une capacité d’analyse, de la créativité… dans une mission de mise en place d’un système d’information, l’accent sera plutôt mis sur l’intelligence sociale au niveau collectif, la capacité à embarquer les gens, la force de conviction, et cetera. », explique Bertrand Maguet.

Gare au retour des mauvaises pratiques d’achats

Ce travail sur les compétences et les savoir-être attendus permet à la Commission achats de défendre une approche de l’achat de conseil moins focalisée sur le critère économique ; « Au sein de la commission achat, nous avons toujours lutté pour que le critère prix ne soit pas supérieur à 50 % », rappelle Bertrand Maguet.

Depuis 2023, nous voyons réapparaître des pratiques d’achat non vertueuses, telles que des enchères inversées ou encore des marges-arrières

Un rappel pas inutile à un moment où les tensions du passé pourraient revoir le jour. Avec l’inversion en cours du rapport de force entre clients et fournisseurs, Bertrand Maguet et ses confrères s’inquiètent du retour de mauvaises pratiques d’achats. « Ces dernières années, l’équilibre offre demande était plus en faveur des consultants, il y avait même attrition et d’un manque de compétences sur certains domaines. Depuis 2023, nous voyons réapparaître des pratiques d’achat non vertueuses, telles que des enchères inversées ou encore des marges-arrières », dénonce-t-il, tout en soulignant que la qualité du dialogue instaurée entre consultants et acheteurs s’est profondément enrichie avec le temps. « C’est une spirale vertueuse. Le métier d’acheteur de prestations intellectuelles s’est bien amélioré au fil des années. Nous avons face à nous des acheteurs très bien formés qui alimentent la réflexion », constate, confiant, le président de la Commission achats.